Interview avec l'écrivaine Fouzia BELAID: transmettre et préserver la culture kabyle.
S'entretenir avec l'écrivaine Fouzia BELAID, c’est découvrir une femme passionnée, profondément attachée à sa terre natale, la Kabylie. Enseignante, ancienne correspondante de presse, diplômée en microbiologie, elle s’est tournée vers l’écriture pour raconter sa société et ses valeurs. Aujourd’hui, elle nous parle de son parcours, de ses livres et de ce qui nourrit sa plume.
Vous avez grandi et vous vivez toujours en Kabylie. Que représente cette région pour vous, personnellement et dans votre parcours ?
La Kabylie est ma terre et celle de mes ancêtres. Elle est le symbole de résistance, de solidarité, d’hospitalité, de générosité, d’amour pour la patrie. Les gens sont animés d’un instinct grégaire qui les pousse à l’union pour le bien commun sous toutes ses formes. Elle me nourrit en créant chez moi un sentiment d’attachement à mes racines inébranlable.
Vous êtes enseignante dans un collège. Est-ce un métier que vous aimez ? Et comment se passent vos relations avec vos élèves ?
Je suis enseignante de sciences dans un collège. L’enseignement n’était pas mon choix. Je préfère travailler dans un laboratoire et exercer dans ma spécialité. Quand j’ai terminé mes études, je n’avais pas trouvé un emploi qui correspond à mon profil. Après, je me suis vite habituée à l’enseignement et les relations avec mes élèves sont bonnes hamdoullah.
Avant de devenir écrivaine, vous avez été correspondante de presse pour deux journaux. Que retenez-vous de cette expérience ?
J’étais correspondante de presse pendant deux ans. J’ai écrit pour « La Nouvelle République », puis « Le Matin ». Cette petite expérience m’était très bénéfique. Depuis, l’envie d’écrire ne me quitte plus. C’est une belle expérience malgré sa courte durée. Elle m’a surtout permis d’apprendre comment chercher l’information et la coucher sur le papier.
Qu’est-ce qui vous a poussé à passer du journalisme à l’écriture littéraire ?
Je voulais explorer un autre monde, celui de l’écriture littéraire car c’est un domaine où l’on peut s’exprimer sans contraintes, on peut ainsi plonger dans l’imaginaire et laisser libre cours à l’expression de ses idées et émotions. Dans le journalisme, on doit être objectif, et surtout respecter la ligne éditoriale du journal pour lequel on écrit.
Vous avez une formation en microbiologie. Est-ce que cela influence votre regard sur le monde ou votre façon d’écrire ?
Parfois, oui. Un scientifique a un regard cartésien sur le monde. Je pense que l’on peut écrire des histoires captivantes en s’inspirant des connaissances scientifiques pour créer des personnages et des intrigues basées sur des concepts scientifiques. La réalité est une très bonne source d’inspiration.
Vous avez publié trois livres. Pouvez-vous nous en parler brièvement ?
« Chant de mémoire kabyle » est mon premier ouvrage que je considère comme une polyphonie. C’est un récit dans lequel j’ai essayé de mettre en exergue le patrimoine culturel immatériel de la Kabylie. J’ai mis en avant quelques aspects des traditions de Bejaia à travers une histoire de vie d’un garçon et d’une vieille femme. Ces deux personnages, qui, malgré la différence d’âge, avaient deux points en communs, le lieu et la période de vie. L’enfant représente l’apprentissage, quant à la vieille, c’est la transmission et la sagesse. J’ai également introduit des contes de ma propre imagination et de la poésie.
Le second s’intitule « Contes merveilleux de Kabylie ». Il contient huit contes très anciens que j’ai recueillis auprès de vieilles femmes de mon entourage. Et je les ai rassemblés. En majorité, ces contes sont habités d’un bestiaire fantastique. La représentation animalière est très importante. Ce qui facilite la transmission de la moralité, qui est l’un des objectifs principaux du conte, sans parler d’autres bienfaits qui sont importants pour le développement de la personnalité de l’enfant.
Votre dernier livre est un roman intitulé "Les Brumes du destin". Quelle est l’histoire derrière ce livre ? Qu’est-ce qui vous a inspirée ?
« Les Brumes du destin » retrace le parcours de Saïd et d’autres personnages que le destin malmène au gré des mutations sociologiques et historiques et dont l’histoire personnelle se confond avec celle du pays durant la colonisation. De la solitude à l’emprisonnement, ses tourments ne s’arrêtent pas et se répercutent sur sa famille.
Il y a du vrai dans ce roman. Saïd a vraiment existé. On m’a raconté une partie de sa vie. Son histoire m’a vraiment touchée. C’est pour cette raison que j’ai décidé de l’écrire avec beaucoup plus d’imagination. Dans ce livre, il y a aussi des personnages fictifs et des scènes imaginaires.
Dans vos écrits, on sent un fort attachement à la culture kabyle. Pourquoi ce choix ?
En effet, je suis très attachée à la culture kabyle car elle est témoin de mon identité culturelle et sociale. C’est une culture très riche par sa diversité. Elle est aussi authentique et créatrice.
Est-ce important pour vous d’écrire pour mettre en valeur et défendre la culture kabyle ?
Oui, c’est important pour moi de défendre notre culture car elle est menacée par la culture de masse qui est étroitement liée à la société de consommation et la mondialisation. Elle se développe à une vitesse vertigineuse surtout avec l’évolution de la technologie et l’apparition du support numérique. Donc, il est impératif de faire un effort pour contribuer à la pérennité de la culture kabyle.
Pensez-vous écrire un jour en kabyle, votre langue maternelle, ou souhaitez-vous être traduite ?
Oui, j’aimerais bien le faire un jour mais en ce moment, je pense à la traduction de mes œuvres en tamazight.
À quel public s’adressent vos livres ? Qui avez-vous en tête lorsque vous écrivez ?
Mes livres s’adressent à un large public, des jeunes et des adultes. Bien sûr, après, chaque lecteur a ses goûts et ses propres préférences.
Où peut-on se procurer vos livres ? Sont-ils disponibles en ligne ou en librairie ?
Mes deux premiers livres sont disponibles en librairies. Le dernier, il est disponible en ligne sur toutes les plateformes : FNAC, Cultura, Amazon, Dicitre, Lireka …
Quel message aimeriez-vous transmettre à travers vos livres ?
Le message dépend de la thématique du livre. Il diffère d’un roman à l’autre.
Avez-vous d’autres projets d’écriture en préparation ?
Oui, j’ai un projet d’écriture. Je prépare un recueil de poésie et un roman.
À travers notre site, souhaitez-vous adresser un message particulier à vos proches ou à vos lecteurs ?
Je dirai à mes lecteurs et à mes proches qu’ils sont ma première source d’inspiration et que sans eux, je ne peux pas continuer à écrire.
Pour finir, quel serait votre mot de la fin ?
Rien ne remplace le livre car c’est est une porte vers le développement et l’épanouissement de toutes personnes. Le promouvoir est la meilleure façon de lui rendre sa valeur. Le livre est une instruction, une détente, une évasion, une éducation, un apprentissage…
Propos recueillis par S. BENDALI
https://amaz-ling.blogspot.com/2025/06/interview-avec-lecrivaine-fouzia-belaid.html
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